Paris, critiqué par les opposants togolais, se défend de toute ingérence
Le 28 avril 2005, publié sur ufctogo.comLa France, prise à partie dans les rues de Lomé, se défend de soutenir le candidat du pouvoir au Togo Faure Gnassingbé, proclamé vainqueur d’une présidentielle contestée qui a déclenché des violences dans le pays.
"Dans ce scrutin, ni pendant, ni avant, ni après et, pour l’avenir, il n’y aura pas d’ingérence de la France dans les affaires du Togo", s’est défendu jeudi matin le ministre des Affaires étrangères Michel Barnier, sur France 2.
"L’avenir du Togo est entre les mains des Togolais. C’est aux Togolais de trouver le chemin du dialogue, du respect mutuel pour aborder cette nouvelle étape de leur destin", a-t-il poursuivi, avant d’ajouter : "Je ne me suis jamais prononcé sur le résultat de ce scrutin".
Cette déclaration tente d’effacer une image de Paris qui serait l’ami des pouvoirs dictatoriaux de son ancien pré carré. A Lomé, les manifestants accusent Paris de soutenir le fils du général Gnassingbé Eyadéma, avec lequel la France a eu de très bons rapports pendant ses 38 ans de pouvoir sans partage.
Interrogé jeudi pour savoir, si, finalement, Paris avalisait la victoire du fils Eyadéma, le Quai d’Orsay a souligné que le résultat n’a pas été confirmé officiellement.
"Comme vous le savez, les résultats définitifs des élections au Togo n’ont pas encore été proclamés", a précisé son porte-parole Jean-Baptiste Mattéi, ajoutant : "Nous nous concertons avec nos partenaires européens et nous sommes en contact avec l’Union africaine et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)".
A l’exception notable du Nigeria, la communauté internationale fait en effet preuve d’attentisme, aucune capitale ne se pressant pour reconnaître le vainqueur proclamé d’une élection contestée.
Washington et Montréal, tout en appellant au calme, ont relevé des irrégularités et n’ont pas reconnu la victoire du fils Eyadéma. L’Union africaine et les Nations unies ne se sont pas non plus prononcées.
Seule la CEDEAO et Paris estiment, et Michel Barnier l’a redit jeudi matin, que "malgré les incidents, il y avait eu un déroulement globablement satisfaisant".
Ce que contestent opposants togolais et organisations en France, qui affirment que des "fraudes massives" ont marqué le scrutin.
L’ancien secrétaire d’Etat français Kofi Yamgnane, qui a également la nationalité togolaise, "critique la position française selon laquelle tout s’est bien passé globalement".
Selon lui, des "généraux togolais ont été reçus à l’Elysée" après la mort du général Eyadéma, le 5 février, saluée par le président Chirac comme la "perte d’un ami de la France" et "d’un ami personnel".
M. Yamgnane a précisé que, parmi les Français pris à partie à Lomé, beaucoup se sont réfugiés "à l’ambassade d’Allemagne" et "cela montre bien que la France est en décalage avec la réalité, si ses ressortissants se réfugient ailleurs !".
Le ministère de la Défense français a indiqué jeudi suivre "avec vigilance mais sans inquiétude précise" les événements au Togo, où la situation "semble à l’accalmie".
Le PS a estimé dès mardi que "la diplomatie française se doit d’être impartiale". Mais une dizaine d’organisations françaises, dont les Verts, Survie, Terre des Hommes, estiment que Faure Gnassingbé est "fort du soutien sans faille de la présidence de la République française".
Après la Côte d’Ivoire, où la crise a montré la perte d’influence de la France dans son ancienne colonie, le Togo accentue un peu plus encore l’affaiblissement de la position française dans les pays africains qui ont longtemps été ses partenaires privilégiés.