Chiraquisme

Polynésie française : des airs de « République bananière »

par La Libre Belgique (Belgique) , le 22 octobre 2004, publié sur ufctogo.com

Vers une grave crise institutionnelle en Polynésie ? La situation s’y dégrade.
Certains font le parallèle avec l’évolution dramatique de la Nouvelle-Calédonie il y a une dizaine d’années. Sur fond d’écroulement du chiraquisme d’outre-mer.

 

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Drapeau du Front de libération de la Polynésie (FLP) :
Tavini huiraatira no te ao ma’ohi « Servir le peuple ».

La Polynésie est-elle en train de prendre le chemin dramatique qui, il y a dix ans, conduisit la Nouvelle-Calédonie à l’instabilité et à la violence politiques ? Ce constat inquiétant a été dressé cette semaine par l’opposition socialiste à Paris. Et vendredi, preuve a contrario que ce scénario est bien dans les esprits, le leader indépendantiste tahitien Oscar Temaru, sur toutes les radios de la métropole, a dû promettre que le sang ne coulerait pas dans ce territoire français d’outre-mer.

Dans la nuit de vendredi à samedi, Oscar Temaru devait être remplacé à la présidence du gouvernement local par celui qu’il y avait évincé aux élections locales du printemps, le sénateur Gaston Flosse : un proche de l’Elysée, qui régna sans partage sur l’île pendant plus de quinze ans (1984-1987 et 1991-2004) et qui, grâce à un rocambolesque renversement d’alliance, vient de mettre le jeune pouvoir indépendantiste en minorité.

Deux Présidents lundi ?

Le retour au pouvoir du vieux leader chiraquien ne sonnerait toutefois pas l’épilogue d’une saga qui agite la Polynésie depuis six mois et a conduit, le week-end dernier, le cinquième de sa population dans les rues. Les indépendantistes, en effet, ont boycotté l’élection de vendredi et pourraient bien, lundi, lors d’une nouvelle réunion de l’Assemblée, boycottée cette fois par les chiraquiens, réélire Oscar Temaru. Dans ce cas de figure, entre autres rebondissements juridiques annoncés, la Polynésie se retrouverait avec deux Présidents à sa tête.

Exotique et somme toute assez innocente fantaisie politique ? En métropole, ces événements ne font sourire personne.

Pour trois raisons, au moins. D’abord, parce que, marquée notamment par de très grandes disparités, la situation économique et sociale en Polynésie - comme souvent dans les départements et territoires français d’outre-mer - est tendue ; les politiques n’ont donc pas intérêt à y jouer avec le feu. Ensuite, parce que les coulisses de ces chamailleries sont, de toute évidence, peu reluisantes. Audits et enquêtes judiciaires mettent en lumière l’ampleur de la dégradation des moeurs politiques locales. Gaston Flosse, déjà condamné pour recel d’abus de biens sociaux, est poursuivi pour une centaine d’emplois fictifs. Son système est soupçonné de dérives autoritaristes et clientélistes. Au point de susciter « la plus vive préoccupation » des organisations françaises de défense des droits de l’homme, qui diagnostiquent « un risque de République bananière ». Enfin, parce que, en totale infraction avec le nouveau statut d’autonomie dont bénéficie la Polynésie, Paris se distingue par son ingérence dans ce dossier. La gauche est accusée de souffler sur les braises ; le gouvernement est soupçonné d’avoir intrigué pour renverser la coalition indépendantiste.

Une fin de règne

Alors que le climat politique se dégrade en Polynésie, dans d’autres possessions françaises d’outre-mer, les choses ne s’arrangent guère. En Nouvelle-Calédonie, le processus de transition initié par les accords de paix de 1988 connaît de fréquents ratés. Quant aux Antilles, elles tardent à décoller économiquement et subissent de fréquentes tensions sociales.

Dans ces deux régions, au demeurant, le chiraquisme vient de connaître des défaites aussi cinglantes qu’historiques. En Guadeloupe, Lucette Michaux-Chevry, parlementaire depuis 1959, présidente du conseil régional depuis douze ans - et déjà condamnée pour concussion, favoritisme et usage de faux - a mordu la poussière aux élections régionales de mars. Et aux dernières élections provinciales de Nouvelle-Calédonie, le leader historique des Caldoches Jacques Lafleur, député depuis vingt-six ans, a été mis en minorité.

Deux défaites qui, ajoutées à l’échec du référendum institutionnel aux Antilles en décembre 2003, font dire à l’opposition que le chiraquisme d’outre-mer connaît décidément une « fin de règne » retentissante.

Bernard Delattre - La Libre Belgique - Visiter le site

 

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