Togo : la situation politique actuelle
par UFC France , le 10 février 2002, publié sur ufctogo.com
En dépit des difficultés liées aux opérations de révision des listes électorales (du 7 décembre au 16, prorogées ensuite jusqu’au 19 décembre), les opinions togolaise et internationale pensaient en avoir fini avec le double langage et les manœuvres dilatoires de M. Eyadéma et du RPT. Et elles espéraient bien que les élections législatives anticipées se tiendraient les 10 et 24 mars 2002.
Les prétextes de Gnassingbé Eyadéma et du RPT....
Alors que le processus électoral semblait enclenché, le parti au pouvoir et son chef ont invoqué deux motifs pour en bloquer l’évolution. Ces motifs et leur enjeu sont révélés dans une "note d’information" que le premier ministre, Agbeyomé Kodjo a publié le 16 janvier dernier, pendant le séjour à Lomé des facilitateurs du dialogue intertogolais.
Relevons en premier le refus du RPT de confier à l’imprimerie nationale de France, l’impression des cartes d’électeurs, comme l’avait suggéré l’ambassadeur de France. En effet, le RPT privilégiait une procédure d’appel d’offres pour la commande des cartes d’électeurs : nouvelle manière de retarder l’expression du peuple togolais.
En outre, invoquant l’article 20 du Code électoral, Agbeyomé Kodjo affirme que " la composition de la Commission électorale nationale indépendante ( CENI ) aurait due être renouvelée au cours du dernier trimestre de l’année 2001". Selon Agbeyomé KODJO, il convient de constater la paralysie de la CENI et d’y remédier dans les plus brefs délais. Ainsi, les termes de la note invoquée prouvent que Eyadéma et son parti ont accepté la création de la CENI de guerre lasse. Dès lors, tout a été fait pour paralyser cette institution, voire la remettre en cause. L’enjeu de ces manœuvres étant de confier l’organisation et la supervision des élections au ministre de l’intérieur, et renouveler l’épisode honteux de juin 1998.
Les ambiguïtés du facilitateur B. Stasi....
C’est dans ce contexte que les facilitateurs en mission à Lomé depuis le 14 janvier dernier, ont fait le 17 janvier, les propositions suivantes au RPT et à l’opposition :
les facilitateurs proposent que la commande et la livraison des cartes d’électeurs se fassent sous leur responsabilité. - Ils proposent de renouveler le mandat et les fonctions actuelles des membres de la CENI jusqu’à la tenue effective des élections législatives de 2002.
De même, et au nombre des sujets importants laissés en suspens, les facilitateurs citent : le montant de la caution exigible aux candidats, les experts auprès de la CENI, l’observation des élections...)
Telles furent les propositions faites par les facilitateurs en vue de dénouer la nouvelle crise provoquée par le RPT. Faisant suite à la sollicitation expresse des facilitateurs, l’UFC a donné son accord aux propositions des facilitateurs, le 19 janvier 2002.
Les intentions réelles de Gnassingbé Eyadéma et du RPT ....
Cependant, la réponse du RPT à ces propositions consista à refuser les propositions des facilitateurs (le 22 janvier 2002), allant jusqu’à demander au gouvernement de constater la paralysie de la CENI, et donc de prendre des mesures afin d’y remédier.
C’est ainsi que l’Assemblée monocolore a modifié unilatéralement le Code électoral. La disposition essentielle vise à écarter Gilchrist Olympio du futur scrutin présidentiel, car la loi adoptée par l’Assemblée illégitime impose une condition de résidence de douze mois pour être candidat. Point n’est besoin de s’étendre sur le contenu des modifications adoptées, puisque cette Assemblée ne représente pas le peuple togolais. Par conséquent toute mesure adoptée ne reflète pas la volonté du peuple, mais celle d’un clan qui a pris en otage le peuple togolais depuis 1967.
Eyadéma et le RPT ne veulent pas d’élections libres et transparentes.
Eyadéma et son parti n’ont jamais collaboré franchement à l’organisation des élections. C’est ainsi qu’ils se sont méthodiquement employés à paralyser la CENI. Eyadéma et ses hommes savent très bien que les fortes prérogatives dévolues par la loi à la CENI( article 3 et 9 du Code électoral ) auraient rendu difficiles leurs tripatouillages et leurs magouilles.
Du reste, il est significatif que le RPT et son chef n’aient pas signé le Mémorandum d’entente requis pour le déploiement des observateurs européens, alors que ce document leur avait été transmis depuis septembre 2001. Il fixe en effet les termes de référence pour des élections transparentes.
En effet, la transparence en matière électorale se situe dans tout un processus qui va de l’élaboration du code électoral, à l’inscription sur les listes électorales, à la confection des cartes d’électeurs, au découpage territorial en des circonscriptions électorales, à la circulation sans entrave des militants des partis en campagne, à la garantie de sécurité pour tous, à la neutralité des forces armées et de sécurité, au déroulement du scrutin, au dépouillement, à la centralisation des résultats provisoires, à la délibération et à la proclamation des résultats définitifs...
Les exigences de l’UE
Eyadéma et le RPT savaient bien qu’ils ne pouvaient plus mystifier l’Union européenne. Le mensonge et le double langage dont ils ont abusé ne passaient plus. L’Union européenne qui finance le dialogue intertogolais et la mission des facilitateurs était suffisamment avertie sur la nature de ce régime. Le cas des élections présidentielles de 1998 est encore présent dans les esprits à Bruxelles.
Ainsi, toutes les résolutions du Parlement européen ( 06-09-2001 ; 13-12-2001 ) depuis la signature de l’Accord-cadre, ainsi que les déclarations de la Présidence du Conseil européen ( 13-09-1999 ; 12-10-1999 ; 09-12-1999 ; 20-04-2000 ; 12-07-2000 ; 06-02-2001 ; 14-05-2001 ; 25-06-2001 ; 06-07-2001 ; 18-10-2001 ; 10-12-2001 ; 07-02-2002 ) ne souffrent d’aucune ambiguïté. Si pour M. Stasi, les responsabilités dans le blocage actuel ne sont pas bien définies, les termes des résolutions du Parlement européen, et les déclarations du Conseil établissent on ne peut plus nettement les responsabilités du RPT dans le blocage actuel du dialogue intertogolais, et dans la mise en œuvre de l’Accord-cadre. Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européen fustigent très nettement le comportement irresponsable du RPT et de son chef qui ont mis en péril le processus électoral ainsi que l’Accord-cadre.
L’Union européenne n’est pas dupe des manigances du RPT et de Gnassingbé Eyadéma. C’est parce que M. Eyadéma et son parti ne peuvent plus mystifier les partenaires occidentaux que les courtisans se répandent en insultes et en diatribes contre les récentes prises de position européenne et américaine.
L’Union européenne est très attentive à la situation politique du Togo depuis juin 1998. Les exigences très souvent répétées de l’Union européenne depuis le dialogue intertogolais, sont le respect de l’Accord-cadre par toutes les parties, et l’organisation d’élections législatives libres et transparentes. Ce sont les conditions nécessaires pour une reprise de la coopération avec le Togo. Et l’acceptation du financement de ce scrutin par l’Union européenne s’accompagne de certaines conditions que le RPT et son chef ne pouvaient ignorer.
En outre, l’accord de partenariat entre le Togo et l’Union européenne est soumis à des exigences politiques que le Togo ne remplit pas. L’organisation des élections législatives devait répondre à des normes précises définies par l’Union européenne ; et le RPT sait que le respect de ces exigences ne pouvait que conduire à la manifestation de sa détestation par le peuple togolais tout entier.
En effet, certaines des conditions minimales imposées par l’Union européenne n’ont jamais été respecté par le RPT, et cela n’augurait pas d’un scrutin transparent et démocratique. En dépit de l’Accord-cadre censé apaiser la vie politique au Togo, Eyadéma et le RPT ont persisté dans leurs pratiques d’antan. Des journalistes ont été emprisonnés, des journaux ont été ( et sont ) saisis, des dirigeants politiques ont été arrêtés, des manifestations garanties par la Constitution ont souvent été interdites, les médias publics sont toujours le lieu des insultes et des invectives envers l’opposition et ses leaders, le Centre et le Nord du pays sont interdits d’accès aux partis de l’opposition, le parti au pouvoir refuse de discuter du découpage électoral, le montant de la caution à déposer par les futurs candidats n’a pas été baissé...
La double stratégie d’Eyadéma mise à nue ou le syndrome de la décadence
A la lumière de ces événements, il est manifeste que le RPT et Eyadéma acceptent le risque d’une marginalisation sur le plan international, et lancent un défi à l’opposition et au peuple qu’ils ont pris en otage avec l’aide d’une armée clanique.
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